Chasse : l’exil forcé de Luc Alphand

La chasse est méprisée et les gens savent bien qu’elle est totalement dépassée historiquement. Reste qu’elle fait partie des traditions, de l’idéologie dominante : il faudra une révolution pour la balayer.

Mais, en attendant, l’esprit est déjà là. C’est ce qu’il faut comprendre de la longue complainte de Luc Alphand, qui a été skieur professionnel, dans le  magazine VSD. Une complainte qui vaut le détour, car elle montre que la pression populaire, ça ne rigole pas.

Même comme notable et sportif reconnu par les médias, même à Serre-Chevalier, il a fallu d’une photographie pour que la colère populaire s’abatte depuis 2016…

Luc Alphand justifie cette photographie sur le fameux mode à la française : ce n’est pas moi, ce n’est pas de ma responsabilité, je ne faisais que passer, etc.

Vous compre­nez que, dans ce cas, c’est plus la photo et l’idée de fierté qui s’en dégage, qui choquent ?

Oui, sauf que cette photo, ce n’est pas moi qui l’ai postée. Je n’ai même pas Face­book, et, sur mon Insta­gram, je ne poste jamais de photos de chasse. Celle-ci a été prise avec l’iP­hone d’un guide de chasse qui se trou­vait sur la même zone que moi avec son client. Moi je chas­sais le mouflon et eux, l’ours.

En rentrant, ils l’ont dépecé, sont allés jeter la carcasse et, comme il commençait à faire nuit et froid, je me suis mis sur la peau de l’ours. Quand ils sont reve­nus, ils ont voulu faire une photo.

J’ai accep­té… Bon, je n’au­rais visi­ble­ment pas dû. Mais c’était une photo entre potes, je n’ai pas pensé une seconde que le guide allait la mettre sur son site.

Comme on le voit, il n’y a aucune autocritique, Luc Alphand ne comprenant même pas ce qu’on lui reproche… Enfin, feignant de ne pas comprendre ce qu’on lui reproche, parce qu’il assume tout à fait de chasser « depuis trente-cinq ans » : il sait donc tout à fait ce qu’il fait.

D’ailleurs, s’il est capable de partir à Abu Dhabi faire des spéciales du Cham­pion­nat du monde de rallyes- raids (il a également fait le Paris Dakar par le passé), c’est bien qu’il est imbriqué dans un système totalement dépassé et lamentable, mélangeant pollution et meurtre.

D’où une déferlante populaire spontanée – donc pas nécessairement organisée de manière adéquate, mais avec la dignité de la mise au ban en raison des valeurs considérées comme indéfendables et, même, condamnables.

Luc Alphand parle de milliers de messages « de haine incroyable », d’insultes sur les notes de l’hôtel où travaille sa femme, d’insultes contre ses enfants à l’école, d’un tiers des sponsors qui l’ont abandonné, de conventions annulées, d’une piste de ski à son nom dont le panneau a été enlevé, etc.

Disons le : la forme pourrait être bien meilleure. Toutefois, c’est historiquement inévitable en attendant le grand coup de balai. Et ce coup de balai ne pourra pas être freiné par les appels au libéralisme, comme Luc Alphand tente également le coup :

Discu­ter avec des extré­mistes qui agissent au nom d’une idéo­lo­gie ne sert à rien. Ils trashent pour nuire et détruire. (…)

Toute espèce a besoin d’être régu­lée. Alors, oui, il y a un énorme fossé qui se creuse entre une France à 80 % urba­ni­sée, qui se détourne de ses racines, et les gens de la campagne. (…)

Sortez de derrière vos ordi­na­teurs. Marchez dans la nature, ouvrez les yeux, accep­tez les autres. La solu­tion est dans le partage : la nature est à tout le monde, chas­seurs compris.

Ces phrases sont un modèle de libéralisme, de relativisme…Combiné, comme chez Emmanuel Macron, avec un éloge du terroir, de la France profonde… Voilà l’ennemi de la Cause, ennemi qui ne vise qu’à freiner l’inévitable changement complet de mode de vie qui est nécessaire!