Combattre les jeux d’argent, cette machine à dépendance

Dans cette société, il est très difficile d’être hors d’atteinte des agressions psychologiques. La raison est toute trouvée : les gens relativisent tout, se disent que si c’est leur goût après tout ils peuvent bien faire ce dont ils ont envie… et quand on est pris dans l’engrenage, c’est trop tard, car il y a tellement d’ego que le recul est impossible. Et encore moins la capacité de s’en sortir.

Raison de plus de se protéger et d’avoir une position ferme quant aux jeux d’argent. Ceux-ci sont l’un des pièges les plus importants de ces derniers temps, car il y a une véritable vague. Il faut dire ici qu’il y a regain en général du coup du « hold up », de l’appropriation imméritée, en jouant sur sa « chance », sa beauté, son cynisme, etc.

Il faut dire aussi que la vie dans cette société est tellement aliénante que qui ne chercherait pas à s’en sortir, d’autant plus pour quelques euros, comme les jeux d’argent le prétendent ?

Culturellement, les jeux d’argent sont très concrètement incontournables. Ils s’immiscent dans la vie privée, dans les discussions sociales, voire dans les styles de vie. Il y a internet, bien sûr, mais il y aussi une systématisation des domaines où l’on peut parier. On peut parier sur un match en cours dans de multiples sports, il y a de très nombreux jeux différents, allant des cartes au casino.

Dans ce panorama, il y a aussi la privatisation de la majorité des actions de la Française des jeux qui a eu lieu à la fin de l’année 2019. Et même si l’on décide de se faire interdire soi-même des casinos et des jeux d’argent en ligne (la procédure existe), cela n’empêche nullement le PMU et l’hippodrome, les multiples jeux de grattages achetés dans un commerce, ainsi que le loto ou encore les sites illégaux de jeux d’argent.

Il n’y a ainsi aucun contrôle réel permettant d’éventuellement empêcher quelqu’un de basculer dans les jeux d’argent, la situation étant la même que pour l’alcool. La société se lave les mains et confie à l’individu la prise de responsabilité.

Or, les jeux d’argent sont agressifs sur la psychologie. Ils en appellent à l’ego – on est censé montrer qu’on est plus vif, plus courageux, plus chanceux que les autres. Ils en appellent à l’argent facile – l’argent est disponible, il est présent, il n’y a qu’à le prendre, pourquoi attendre ?

Surtout quand on s’ennuie dans une vie morne, il y a l’idée de tout changer… mais sans changer le monde. Juste changer ce qu’il y a autour de soi.

Le PMU, Winamax, Bwin, Zebet, Betclic, Genybet, France Pari proposent qui plus est un remboursement sur le premier pari. Cela devrait être interdit, car c’est évidemment comme les dealers proposant des drogues dures à bas prix au départ. La dépendance une fois installée, les trafiquants sortent gagnants à moyen terme.

L’État se lave les mains ici en disant : nous n’autorisons en ligne que les entreprises mentionnées plus haut, et uniquement pour le poker, les paris hippiques, les paris sportifs. De plus, dit l’État, les jeux de grattage et de tirage sont sous le monopole de la Française des jeux.

Sauf que la Française des jeux est privatisée et que le monopole ne tiendra pas. De plus, la Française des jeux sort tout le temps de nouveaux jeux. Qui plus est, des jeux de grattage sont même disponibles en ligne…

En tirage, on a Amigo, EuroMillions, Joker +, Keno Gagnant à vie, le loto.

En grattage (y compris en ligne), on a Astro Illiko, Banco Illiko, Black Jack Illiko, Maxi Goal, Morpion, 10 ans gagnant Illiko, Cash, Goal, Défoulo, Millionnaire, Jackpot, La Ruche d’Or, 1000 Carats, Olé Sombreros !, Arbre au Trésor, Bingo, Solitaire, Diamond River, Eldorado, Fruitos, Les Kumulos, Astro, Numéro Fétiche, Mots croisés, Pharaon, Yam’s, Precius Aurus, etc.

Les paris sportifs sont le problème principal peut-être en ce moment, car ils gangrènent les jeunes hommes. Dans les collèges et les lycées c’est un massacre, surtout que le taux de retour de jeux est plus élevé que pour les jeux de grattage et de tirage. Il est à 85 %, ce qui signifie qu’on a une chance de gagner significative, suffisamment pour happer les gens.

Les sites aimeraient malgré cela encore augmenter ce pourcentage, pour être au niveau de sites illégaux, mais l’État s’y refuse pour l’instant (France Pari Sportif s’est fait exclure pour ne pas avoir suivi cette règle).

Encore est-il que ce taux est encore plus haut au poker, où il est de 95 %! Exactement ce qu’il faut pour faire tomber les gens, qui se croient plus malins et qui tombent dans l’engrenage. Les sites ne manquent pas : Betclic, Bwin, Party Poker, PMU, Pokerstars, Unibet, Winamax !

Notons ici que l’argent circule surtout entre les joueurs, une simple taxe étant prise par les entreprises et L’État. Mais peu importe, puisque c’est la même chose au final : on joue, on devient dépendant, on sombre.

Que dire d’ailleurs du casino, où la redistribution est encore plus haute (98,5 % au baccara par exemple) ? Dans tous les cas, l’histoire n’est pas une question de pourcentage, mais de capacité à utiliser l’ego des gens pour leur faire croire qu’ils sont plus habiles, plus malins, plus à même de gagner. Une fois qu’on s’imagine supérieur, on a perdu.

Cela, couplé avec l’attrait de l’argent facile propre à une mentalité beauf, c’est fatal.

La question de fond est d’ailleurs comme celle de l’alcool. Il ne s’agit pas que de quelques pourcentages de gens sombrant totalement, même si bien sûr ces gens comptent et doivent être aidés ! Il s’agit du fait que la mentalité des jeux d’argent est également un puissant vecteur culturel de ce qu’il ne faut pas.

Les jeux d’argent ont tout à voir avec l’individualisme, la négation des autres, du monde même. Car si argent il y a, il ne tombe pas de nulle part, et seuls des cyniques peuvent l’accepter ! Si l’on ajoute à cela, en plus, le fait d’être passif et de ne pas vouloir s’impliquer pour que des choses se passent, alors les jeux d’argent sont une catastrophe sur toute la ligne.

Si l’on y réfléchit bien, on peut se dire la même pour les jeux de hasard. Cependant, il y a une différence, au-delà du fond commun, c’est que l’implication n’est pas la même. De plus, les paris sportifs ne se veulent pas des jeux de hasard, mais des jeux fondés sur une certaine habileté s’appuyant sur certaines connaissances. Ceci dit, il est vrai que les jeux de hasard énervent justement les mauvais perdants, qui y voient une injustice effectivement vraiment là.

Tout cela, c’est de la maltraitance psychologique, et cela ne devrait pas exister.