EELV et la proposition de loi anti-vegan pour un « élevage éthique »

Il existe en ce moment une très intense mobilisation en faveur de réformes en faveur du « bien-être animal ». Les forces agissant dans cette direction consistent notamment en Europe Écologie Les Verts, mais pas seulement, il y a également des figures médiatiques, appuyées par telle ou telle personne influente, très influente, extrêmement influente.

Ce que nous sous-entendons par là, c’est que certains ont compris que la question animale avait été très largement saisie par les gens, mais que l’option vegan n’arrive à rien ou pas grand-chose. Il y a donc les moyens de récupérer tout cela par le biais du « bien-être animal ».

La question est ici très complexe, car il y a une partie des gens qui est ici sincère. Pour d’autres, c’est par contre simplement un boulevard à prendre pour s’imposer sur le terrain politique. Inversement, des gens sincères peuvent être corrompus. Ainsi le Parti animaliste a une ligne qui est désormais ouvertement celle du « bien-être animal », en se liant notamment à Europe Écologie les Verts.

EELV propose justement au Sénat une loi « pour un élevage éthique, socialement juste et soucieux du bien-être animal » et cet appel est relayé par exemple sans commentaire par Aymeric Caron, qui se définit pourtant comme « abolitionniste ».

Il est vrai qu’Aymeric Caron revendique fièrement son amitié avec Esther Benbassa, qui est justement la sénatrice EELV proposant cette loi. C’est encore un exemple de corruption : si la proposition avait été faite par quelqu’un d’autre, Aymeric Caron l’aurait descendu en flammes.

Que dit cette proposition de loi, pour laquelle EELV a mis en place une pétition ? Qu’il faut un « abattage éthique et transparent », une « régulation du transport animal », un « encadrement de l’abattage et de l’élevage porcin », un « encadrement de l’élevage et de l’abattage des volailles », un « encadrement de l’élevage cunicole », un « accès au plein air des animaux », un « moratoire sur l’élevage intensif ».

Il y a beaucoup d’arrières-pensées et voici comment il faut en réalité comprendre cela.

Il s’agit tout d’abord de l’interdiction de la « viande » halal et cacher, en exigeant la perte de conscience de l’animal mis à mort. C’est clairement du populisme visant à se donner une image aux dépens d’une partie de l’exploitation animale liée à des religions non majoritaires.

Il s’agit ensuite de faire intégrer les associations du « bien-être animal » dans l’exploitation animale, au moyen d’un « conseil du bien-être animal » pour chaque établissement d’abattage, conseil bien entendu justement composé « d’associations de consommateurs et d’associations de protection animal ».

Cela implique une compensation financière, naturellement, ce qui n’est pas mentionné mais va de soi puisque le conseil peut proposer des « audits en matière de bien-être animal dans l’établissement », des « aménagements », ainsi qu’un « plan de mesures correctrices ».

Il y a ensuite l’interdiction du transport d’animaux au-delà d’un certain nombre d’heures. C’est ici une convergence directe avec les producteurs français, qui torpillent ainsi la concurrence lointaine au moyen d’une loi de « bien-être animal ».

Il y a ensuite l’interdiction de la castration à vif et de la caudectomie des porcelets, ainsi que du broyage des poussins mâles et des canetons femelles vivants. C’est là une « humanisation » de l’exploitation animale qui va avec l’exigence, à partir de 2025, d’un accès au plein air pour les animaux de tout élevage.

Ce dernier point est inapplicable et il n’a qu’un sens : favoriser à fond l’exploitation animale en mode « bio ».

EELV se place en fait comme porte-parole de l’exploitation animale en mode « bio », ce qui est tout bénéfice pour elle au niveau des réseaux. C’est un moyen également, très important évidemment, de prétendre avoir un discours au sujet des animaux.

Voici comment EELV présente, plus directement, son approche.

Quel est le problème ?

Chaque année, en France, plus d’un milliard d’animaux sont abattus. 80% proviennent d’élevages industriels. Ce système agro-alimentaire ne respecte ni les animaux ni les agriculteurs/trices.

Alors que près de 80% des Français·e·s sont opposé·e·s à l’élevage intensif, les lobbies continuent à résister et à défendre un modèle agricole destructeur.
Il est temps de changer de modèle et de passer à une agriculture paysanne, soucieuse du bien-être de l’animal, qui favorise les circuits courts et qui respecte les consommateurs/trices.

C’est pourquoi, la sénatrice écologiste de Paris, Esther Benbassa, a déposé une proposition de loi pour la mise en place d’un élevage éthique, socialement juste et soucieux du bien-être animal.

Demandons son inscription à l’ordre du jour du Sénat !

C’est de la récupération, ni plus ni moins. Les animaux sont pris en otage pour une valorisation opportuniste.

Esther Benbassa, sur son Facebook, essaie même de racoler chez les vegans, c’est dire à quel point c’est de l’opportunisme :

« Tout le monde étant encore très loin d’être vegan, il convient d’œuvrer sans tarder en vue d’un élevage plus éthique et d’accompagner les paysans dans la transition à effectuer pour sortir de l’élevage industriel »

Ce point est très important, car il montre bien que l’initiative est anti-vegan, au sens où elle implique que les vegans se mettent derrière le réformisme du « bien-être animal », comme cinquième roue du carrosse, comme faire-valoir.

Il va de soi que le plan est tellement grossier que cela n’a aucune chance de réussir. Rien qu’en utilisant « élevage éthique », on a une telle monstruosité que n’importe quel vegan un tant soit peu conséquent hallucine littéralement. Cela ne veut bien entendu pas dire que les gens se mettent à former des structures de l’ALF. Mais il y a des limites qui font que, au-delà d’elles, le véganisme n’a plus aucun sens, même en apparence.

C’est ici encore un épisode de plus d’intégration-désintégration. Mais il faut bien avoir en tête que ce n’est là qu’un épisode de ce qui forme un tout nouveau cycle de plusieurs mois s’ouvrant désormais, visant à proposer des réformes, parfois d’ampleur, sans pour autant assumer le véganisme. Voir dans quelle mesure cela est productif ou contre-productif va être ardu.