Mother Sarah est un manga, paru en français chez Delcourt en 11 épisodes entre 1996 et 2004, dont le scénario est d’un intérêt certain pour nous qui sommes pour la libération de la Terre. Il faut d’ailleurs noter au passage que ce scénario a été élaboré par Katsuhiro Otomo, qui est également à l’origine du très grand classique manga qu’est Akira.
On retrouve d’ailleurs la même dimension apocalyptique, et on devine aisément à quel point les explosions nucléaires de Nagazaki et Hiroshima ont traumatisé les gens au Japon, et amené l’affirmation du besoin d’un monde sans destruction.
Mother Sarah est l’histoire d’une mère à la recherche de ses enfants qu’elle a perdu. Cette quête se déroule sur la planète Terre, qui a été martyrisé par un conflit nucléaire. Les humains ont été pour cette raison obligé de se réfugier dans des bâtiments spatiaux et au début du manga, les terriens ne sont installés que depuis assez récemment.
Là où le scénario prend une première tournure incroyable, c’est avec les deux factions se faisant la guerre sur Terre, une guerre déjà commencée dans les bases spatiales.
En effet, un scientifique avait, au bout de sept ans dans l’espace, proposé de jeter une nouvelle bombe nucléaire sur la Terre, dans le but de modifier l’axe terrestre. L’hémisphère nord, qui est irradié, serait alors pris dans les glaces, tandis que les déserts de l’hémisphère sud deviendraient habitables.
Deux factions se font alors la guerre: « Epoque » et « Mother Earth ». Les partisans d’Epoque ont pris ce nom car ils sont favorables à la bombe, et espérent ainsi rentrer dans une nouvelle ére. A l’opposé, les partisans de la Terre-Mère (Mother Earth) refusent catégoriquement cette nouvelle attaque contre la Terre.
Au bout de trois ans de conflit marqué par l’envoi de la bombe nucléaire, la grande majorité des terriens des bases spatiales reviennent sur Terre, où la guerre reprend entre les factions.
Le scénario se concentre alors sur une présentation des hommes comme barbares et guerriers, alors que les femmes sont elles orientées vers le pacifisme, tout en étant continuellement victimes des hommes. Les soldats sont présentés comme brutaux et systématiquement violeurs, tentant d’assassiner des innocents dès qu’ils le peuvent.
Mother Sarah est la seule femme combattante, et malheureusement la très grande majorité du manga consiste en des scènes de bataille où Sarah affronte des ennemis, retrouvant par moments ses enfants. Elle se voit ainsi confrontée surtout aux partisans d’Epoque, mais aussi parfois à ceux de Mother Earth, cette faction ayant décadé et s’étant transformée en une armée équivalente à l’autre sur le plan moral. Les deux armées finissent d’ailleurs par projeter de s’allier.
Le scénario fait alors intervenir une nouvelle faction, venue de l’espace à partir des bases spatiales restantes. Cette faction consiste en la Mother Earth originelle. On a ainsi un parallèle entre la quête de Sarah en tant que mère avec la quête pour notre mère la Terre. Tout le scénario se fonde sur cette double quête.
Les terriens venus de l’espace interviennent car ils ont réussi à recréer une semence devant permettre à l’humanité de survivre de nouveau. Ils ont mis toute leur énergie non pas dans la guerre, mais dans la science et la culture, dans la célébration des végétaux. Ils sont d’ailleurs dirigés par des sortes de « sages », qui tentent de guider les derniers habitants des bases vers un horizon nouveau, ce qui n’est pas sans erreurs non démocratiques qui sont clairement montrées: encore une fois les hommes pêchent par orgueil et autorité.
Les semences ayant besoin de beaucoup d’apport nutritionnel, les terriens des bases spatiales ont décidé de les implanter, se sacrifiant pour que les semences puissent réussir à être fertilisé sur la Terre. La quête de la Terre-Mère signifie donc un sacrifice, une identité totalement tournée vers elle, sur la base d’un altruisme absolu.
L’oeuvre finit sur la destruction du vaisseau de la Mother Earth originelle par des soldats d’Epoque, la Mother Earth militaire étant elle plus ou moins paralysée par le poids de la valeur morale de la Mother Earth originelle. Mais la fertilisation a réussi, et l’une des dernières images consiste en une famille unie, et on notera qu’il s’agit d’une famille musulmane, l’oeuvre assumant souvent d’ailleurs une orientation humaniste et universaliste.
Mother Sarah n’est pas forcément un excellent manga sur le plan de l’action, qui est uniquement tournée vers Sarah et très décalée par rapport à l’énorme questionnement qui se profile derrière. Et absolument jamais la question des animaux n’est abordée; il n’y a sur Terre que des êtres humains, voire que des hommes d’ailleurs, tellement les femmes sont présentées comme passives ou seulement capables d’initiatives pacifistes de type religieuse – mystique.
On ne voit pas non plus très bien si le manga est une dénonciation pessimiste d’une catastrophe inévitable, ou bien un appel à saisir le rapport essentiel à la Terre-mère. C’est donc à nous de faire notre choix, de prendre nos responsabilités!