Une importance capitale doit être attribuée aux mots, aux concepts. Toute opposition ou trahison de la lutte se reflète également dans le choix des mots.
Le concept de « libération totale » signifie par exemple historiquement la libération animale et la libération de la Terre : cela veut tout dire quand certains reprennent ce concept pour remplacer la Terre par les humains.
Hier, c’est le terme d’euthanasie qui a été odieusement tronqué par la presse, à l’occasion de l’assassinat du girafon Marius. Rappelons que ce terme signifie la mise à mort d’un être vivant afin d’abréger une souffrance très grande liée à une maladie incurable amenant à la mort dans un délai bref.
Le terme a comme étymologie le grec où ευθανασία signifie « bonne mort », alors déjà obtenue par calmants ou poisons. Par la suite lors de la période humaniste, c’est le philosophe anglais Francis Bacon qui a remis en avant ce concept.
Or, que s’est-il passé hier suite à l’assassinat du girafon Marius ? Les médias ont parlé d’euthanasie.
Le Monde a ainsi publié un article intitulé « 5 questions sur l’euthanasie d’un girafon au zoo de Copenhague », LCI s’est lancé dans un « Girafon euthanasié à Copenhague : hystérie sur le web, menaces sur le personnel », itélé titre son article « Danemark : le girafon Marius euthanasié », Le Point annonce en titre: « Copenhague : un girafon en parfaite santé euthanasié dans un zoo », etc. etc.
La liste est sans fin. Et l’origine de tout cela est bien entendu la nécessité de masquer qu’il s’agissait d’un assassinat pur et simple. L’anthropocentrisme est obligé de se cacher, de prétendre traiter « humainement » les animaux qu’il garde proche de lui, par opposition à ceux enfermés dans les abattoirs-usines.
Or, cette fiction ne tient pas. Les « animaux de compagnie » sont maltraités, parfois torturés, et là même ceux des zoos, ces prétendus refuges pour espèces en danger, ces « havres de paix », montrent leur hideux visage, celui du sang qui coule, de l’enfermement terrible, écrasant toute possibilité d’épanouissement.
L’assassinat de Marius n’est pas une euthanasie, cela a été la mise à mort d’un jeune être vivant en pleine santé. Cela est défini comme euthanasie comme si la vie ne prenait un sens que par rapport à l’humanité, et cela est une faute terrible – l’anthropocentrisme est un véritable crime, une insulte faite chaque jour à Gaïa et tous les êtres qui y vivent.
Après cette « euthanasie » – en fait meurtre au pistolet d’abattage – Bengt Holst qui est directeur scientifique du zoo s’est même fendu d’une explication « rationnelle » :
« Aujourd’hui, les girafes se reproduisent beaucoup, et vous devez faire un choix: vous devez garder celles qui ont les meilleurs gènes. »
A cela, nous opposons le biocentrisme. La vie a une valeur en soi, et il faut élargir au maximum, toujours plus historiquement, la défense du vivant, jusqu’à un jour protéger les végétaux eux-mêmes.
Sans cela, on tombe inévitablement dans la logique individualiste de la loi du plus fort, qui est tout sauf naturel. Le discours sur les « gènes » n’est pas naturel, mais bien tenu par un responsable de zoo, qui a décidé de choisir qui peut être vivant et qui ne le peut pas.
La Nature, dans sa complexité incroyable, n’a pas progressé sur des millions d’années pour que tous les progrès dans son développement soient saccagés, meurtris, anéantis par ce genre de type. L’humanité pourrait jouer un rôle positif dans l’évolution de la Nature, contribuant à son avancée à toujours plus de complexité et de symbiose.
La position humaine – tout subordonner à une seule espèce – est à la fois criminelle et absurde, totalement incompatible avec le concept même de la vie existant sur notre planète, où toutes les activités des êtres vivants sont par définition inter-reliées.
Pour les médias et les esprits mesquins façonnés par l’anthropocentrisme, la mise à mort de Marius est un fait divers ; pour les esprits progressistes, c’est un crime. Mais pour qui voit cela à l’échelle de plusieurs millénaires, il y a une dimension terrible qui se profile à l’arrière-plan, celle de l’opposition impossible entre l’humanité et la Terre comme système.