Ainsi, elle a réussi cette opération dont nous avons parlé il y a peu au moment de la démission de la responsable de la SPA (de Paris), la présentatrice Natacha Harry. C’est un haut responsable militaire, Jacques-Charles Fombonne, qui prend les commandes de cette importante structure de la protection animale, sans en avoir jamais fait partie.
C’est une solution purement pragmatique, sans aucun contenu, visant à « épurer » une structure entachée de très multiples scandales ces dernières années.
Sauf que cela ne marche nullement comme cela. Il ne suffit pas de nommer un soldat pour compenser les multiples problèmes internes à l’approche générale de la protection animale.
Il ne s’agit pas de « rétablir l’ordre » ou de surveiller administrativement les sphères pouvant céder à la corruption. Cela, c’est la réponse d’extrême-droite, la réponse du coup de force, la réponse qui vient a posteriori, sans établir la nature des problèmes.
Quelle est la nature de ces problèmes ? On peut en dresser la liste :
- il y a une multitude de SPA (et les refuges en général), ce qui disperse les forces. C’est terriblement vrai pour les refuges, qui tiennent avec des bouts de ficelle, ce qui amène certaines personnes à être horrifié et à dénoncer… les refuges au lieu de mettre la main à la pâte !
- l’État s’appuie systématiquement sur ces associations, sans n’apporter ni moyens ni reconnaissances. En clair, lorsqu’un animal est trouvé par la police, la gendarmerie ou les pompiers, une association locale est prévenue pour le prendre en charge. Il n’y a ni suivi ni soutiens financiers. Les associations doivent assumer ce que la société ne veut pas assumer elle-même, avec leurs propres moyens, un grand sens du sacrifice.
- il n’y aucune démocratie dans les associations, et par contre un culte de l’ego pour la direction des associations, avec des individus se mettant sans cesse en avant, déformant la nature du projet. Cela ne concerne d’ailleurs pas que la protection animale, il n’y aucune différence d’approche dans la personnalisation entre la Fondation Brigitte Bardot ou 269. C’est la course à la photo, aux propos chocs, à la médiatisation, etc.
- cette absence de démocratie va de paire avec la nullité du niveau de discussion, ce qui est amené par l’absence de perspective. La SPA, par exemple, n’a aucune ambition pour le futur, elle est une fin en soi, comme d’ailleurs la plupart des associations. Cela amène cette course à la participation aux procès pour toucher des fonds, ce qui irait si les associations n’étaient pas plusieurs à le faire en même temps, empêchant toute vue d’ensemble.
- il y a beaucoup d’argent et sans morale la plus stricte, fondée sur le véganisme le plu intransigeant, les craquages par la corruption sont inévitables. Et encore, il ne faut pas seulement le véganisme, à notre sens, mais la culture vegan straighte edge, avec la morale de l’affrontement et la victoire totale comme objectif !
Finalement, d’ailleurs, c’est bien cela le problème. Ce qui manque, ce sont des activistes ayant la tête sur les épaules, ayant une bonne culture et une bonne capacité de problématiser, avec un objectif très clair en tête : la libération animale.
La libération animale a besoin de cadres. Ce qui perd la Cause, c’est d’un côté une fuite dans des actions épisodiques, un actionnisme qui épuise les gens (avec un turn-over immense, les gens ne restant pas et à chaque cycle tout recommence avec des gens s’imaginant découvrir quelque chose maintes fois déjà fait), et de l’autre une forme d’intellectualisme coupé de toute réalité.
Ce qui ramène au problème de fond, qui est que la base même de tout mouvement de libération animale doit être non pas l’obsession sur les animaux morts, mais la focalisation sur les animaux vivants. Et partant de là, tant que le véganisme n’aura pas comme fondement la participation concrète et générale aux refuges, il n’obtiendra pas de substance réelle.