Rapport de l’académie des sciences et climato-sceptiques: une comédie

Publié dans les années 1960-1970, le roman « Le Monde vert » de l’anglais Brian Aldiss est particulièrement mauvais, non seulement parce qu’il est totalement délirant, mais surtout parce qu’il attribue le réchauffement climatique… au soleil.

Dans ce roman de science-fiction, la Terre ne tourne plus et sa face tournée vers le soleil consiste en une végétation totale de type jungle, formée de monstres ne pensant qu’à se massacrer les uns les autres et où l’être humain survit tant que bien mal.

Le délire va jusqu’à avoir des insectes géants voyageant dans l’espace, jusqu’à la lune, mais là n’est pas ce qui doit nous intéresser : ce qui compte surtout c’est que dans tout le roman la végétation est considérée comme une ennemie totale, et que ce qui provoque le réchauffement climatique, c’est le soleil.

Une telle affirmation en plein boom économique des trente glorieuses était particulièrement mal vue. Il s’agit d’une conception faisant de l’être humain le centre du monde, l’enfant gâté-pourri de Dieu et pouvant faire ce qu’il veut, comme il veut.

En France, on se considère souvent comme rétif à la religion, et pourtant la même vision religieuse prédomine. C’est ce qui fait qu’on a droit à une bien triste comédie, bien française, dont l’un des avatars a été rendu public hier.

Hier, « l’académie des Sciences » a en effet rendu son rapport sur le réchauffement climatique (on peut le lire ici). Ce rapport est en quelque sorte la position « officielle » de l’État français, cette « académie des sciences » étant en quelque sorte l’équivalent pour la science de ce qu’est « l’académie française » pour la langue française.

Si ce rapport existe, c’est en raison du scandale institutionnel provoqué par la position de Claude Allègre, qui notamment dans « L’imposture climatique » considère qu’il existe un « système mafieux et totalitaire » visant à rendre l’humanité prétendument responsable du réchauffement climatique.

Or, le problème est qu’il est totalement fou de nier la responsabilité des activités humaines dans le réchauffement climatique. Même les académiciens, parasites institutionnels s’imaginant des êtres à part, sont conscients qu’à pousser le bouchon trop loin…

Par conséquent, le rapport, rendu public hier, reconnaît le réchauffement climatique, en tant que conséquence des activités humaines depuis le 19ème siècle. Mais attention, tout cela ne visait qu’à calmer le jeu.

Car ce rapport, même Claude Allègre l’a signé ! Les climato-sceptiques sont en effet de fins tacticiens. Ils savent que « l’académie des sciences » ne représente rien ni au niveau international, ni pour les gens en France.

Surtout que les réunions de « l’académie des sciences » se sont tenues à huis-clos, avec chaque scientifique parlant sept minutes… au cours d’une seule journée.

Les climato-sceptiques peuvent faire semblant de reconnaître aujourd’hui le rapport, tout en s’appuyant demain sur telle ou telle concession qui leur a été faite, comme la phrase « tous les mécanismes pouvant jouer un rôle dans la transmission et l’amplification du forçage solaire ne sont pas encore bien compris » leur permettant de remettre en avant la thèse du soleil comme cause du réchauffement climatique.

Cette histoire de rapport de l’académie des sciences, c’est du cinéma, c’est de la poudre aux yeux, tout comme l’a été le Grenelle de l’environnement.

Claude Allègre, on peut en être certain, ne disparaîtra nullement des médias, bien au contraire même. Gageons même qu’il verra ses positions renforcées, car pour la machine du profit, l’écologie est une perte de temps, à part pour quelques niches commerciales.

Quand on veut faire de l’argent, quand on pille, quand on exploite, on a pas le temps ni évidemment l’envie de se préoccuper de Gaïa… Ce n’est pas compatible, car penser à Gaïa veut dire voir les choses à long terme, et agir en conséquence!

Les grandes entreprises et les médias soutiendront donc les climato-sceptiques, Claude Allègre apparaîtra toujours davantage comme un rebelle, et rappelons que dans la même veine le Front National avait organisé un colloque pour dénoncer comme une sorte de « complot » la thèse du réchauffement climatique comme causée par les humains (voir notre article du début de l’année: L’extrême-droite en guerre contre le « mythe » du réchauffement climatique).

Tout cela est somme toute logique : si on ne comprend pas ce qu’est Gaïa, alors on ne peut pas voir les choses à leur juste dimension ; le réchauffement climatique apparaît comme un épiphénomène, comme une chose vague, floue, finalement secondaire.

Or, le fait est que nous sommes en train d’assassiner la planète. C’est un constat que l’on peut faire partout, depuis l’Arctique jusqu’au rapport des êtres humains avec les pigeons dans les villes. Il s’agit d’une course, d’une course à la mort!

Asimov: les villes deviendront-elles des cavernes d’acier?

Nous avions déjà parlé de l’auteur de science-fiction (ou d’anticipation) Isaac Asimov: à la fin de son oeuvre magistrale (et classique absolu dans la science-fiction), les humains comprennent que tout tend à Gaïa, et même à Galaxia.

Nous en reparlons ici au sujet des villes. Seront-elles des cavernes d’acier? Voici un extrait d’un de ses romans des années 1950, qui s’appelle justement « Les cavernes d’acier » et présente les villes du futur… Ou plutôt le monde entier, car il n’y a plus que des villes gigantesques, où les humains n’ont plus aucun contact avec la nature.

Ces lignes, écrites au début des années 1950, doivent nous faire comprendre la signification essentielle de la nature des villes… et le sens de la libération de la Terre!

Il se laissa aller à méditer sur la ville, cette cité de New York où il vivait et où il avait trouvé sa raison d’être. Elle était la plus importante de toutes les villes d’Amérique, à l’exception de Los Angeles, et sa population n’était dépassée, sur la Terre, que par celle de Shangaï. Or, elle n’avait pas trois cents ans d’âge.

Bien entendu, il y avait eu, autrefois, sur ce même territoire géographiquement délimité, une agglomération urbaine que l’on appelait New York City. Ce rassemblement primitif de population avait existé pendant trois mille, et non pas trois cents ans. Mais, en ces temps-là, on ne pouvait appeler cela une VILLE.

Il n’y avait pas alors de villes au sens moderne du terme. On trouvait, éparpillées sur la Terre par milliers, des agglomérations, d’importance plus ou moins grande, à ciel ouvert, et ressemblant un peu aux dômes spaciens, mais très différentes de ceux-ci tout de même.

Ces agglomérations-là ne comprenaient que rarement un million d’habitants, et la plus importante de à peine dix millions. Du point de vue de la civilisation moderne, elles avaient été incapable de faire efficacement face aux problèmes économiques nés de leur développement.

Or, l’accroissement constant de leur population avait obligé les Terriens rechercher une organisation réellement efficace. Tant que cette population n’avait pas dépassé le chiffre de deux, puis trois, même cinq milliards d’habitants, la planète avait réussi à la faire vivre en abaissant progressivement le standard de vie de chacun.

Mais quand elle atteignit huit milliards, il devint clair qu’une demi-famine la menaçait inévitablement. Dès lors, il fallut envisager des changements radicaux dans les principes fondamentaux de la civilisation moderne, et cela d’autant plus que les Mondes Extérieurs (qui, mille ans plus tôt, n’avaient été que de simples colonies de la Terre) devenaient d’année en année plus hostiles à toute immigration de Terriens sur leurs territoires.

On aboutit ainsi à la formation progressive des grandes villes.

Pour que celles-ci fussent efficacement organisées, elles devaient être très grandes. On l’avait déjà compris d’ailleurs, à l’époque médiévale, mais d’une façon confuse. Les petites entreprises et l’artisanat local cédèrent la place à de grosses fabriques, et celles-ci finirent par se grouper en industries continentales.

La notion d’efficacité et de rendement ne pouvait être mieux illustrée que par la comparaison de cent mille familles vivant dans cent mille diverses maisons, avec cent mille familles occupant un bloc à cet effet dans une cité moderne ; au lieu d’une collection de livres filmés pour chaque famille, dans chaque maison, on créait dans le bloc cinémathèque accessible à tous ; de même pour la télévision et la radio.

Poussant plus avant la concentration des moyens, on avait mis un terme à la folle multiplication des cuisines et des salles de bains, pour les remplacer par des restaurants et des salles de douches communautaires à grand rendement.

Ce fut ainsi que, petit à petit, les villages, les bourgs, et les petites villes du temps jadis disparurent, absorbés par les grandes cités modernes. Les premières conséquences de la guerre atomique ne firent que ralentir un peu cette concentration. Mais dès qu’on eut trouvé les méthodes de construction capables de résister aux effets des bombes atomiques, l’édification des grandes villes s’accéléra.

Cette nouvelle civilisation urbaine permit d’obtenir une répartition optimum de la nourriture, et entraîna l’utilisation croissante de levures et d’aliments hydroponiques. La ville de New York s’étendit sur un territoire de trois milles mètres carrés, et le dernier recensement faisait ressortir sa population à plus de vingt millions. La Terre comprenait environ huit cents villes semblables, dont la population moyenne était de dix millions.

Chacune de ces villes devint un ensemble quasi autonome qui parvint à se suffire à peu près lui-même sur le plan économique. Et toutes se couvrirent de toits hermétiques, s’entourèrent de murs infranchissables, et se tapirent dans les profondeurs du sol. Chacune devint une cave d’acier, une formidable caverne aux innombrables compartiments de béton et de métal.

La cité ainsi conçue était scientifiquement édifiée. L’énorme complexe des organes administratifs en occupait le centre. Puis venaient, tout autour, les vastes secteurs résidentiels soigneusement orientés les uns par rapport aux autres, et reliés par tous les tapis roulants, conduisant eux-mêmes à l’ « express ».

Dans la périphérie se trouvaient les fabriques de toutes espèces, les installations productrices d’aliments à base d’hydroponiques et de levures, et les centrales d’énergie. Et, au milieu de tout cet enchevêtrement, serpentait un prodigieux réseau de conduites d’eau, d’égouts, de lignes de transport de force, et de voies de communications qui desservaient une quantité d’écoles, de prisons et de magasins.

On n’en pouvait douter : la Cité moderne représentait le chef-d’oeuvre accompli par l’homme pour s’adapter au milieu dans lequel il lui fallait vivre et dont il devait se rendre maître. Il n’était plus question de voyager dans l’espace, ni de coloniser les cinquante Mondes Extérieurs, qui jouissaient maintenant d’une indépendance jalousement défendue, mais uniquement de vivre dans la Cité.

On ne trouvait pratiquement plus un Terrien vivant en dehors de ces immenses villes. Car, dehors, c’était le désert à ciel ouvert, ce ciel que peu d’hommes pouvaient désormais contempler avec sérénité.

Certes, toute cette étendue de territoires sauvages était nécessaire aux Terriens, car elle contenait l’eau dont il ne pouvaient se passer, le charbon et le bois, dernières matières d’où l’on tirait les matières plastiques, et cette levure dont le besoin ne cessait jamais de croître. (Les sources de pétrole étaient depuis longtemps taries, mais certaines levures riches en huile le remplaçaient fort bien.)

Les régions comprises entre les villes contenaient encore de nombreux minerais, et on en exploitait le sol, plus intensément que la plupart des citadins ne le savaient, pour la culture et l’élevage. Le rendement en était médiocre, mais la viande de boeuf ou de porc et les céréales se vendaient toujours comme des denrées de luxe et servaient aux exportations.

Mais on n’avait besoin que d’un très petit nombre d’hommes pour exploiter les mines et les fermes, ou faire venir l’eau dans les Cités : les robots exécutaient ce genre de travail mieux que les hommes, et ils causaient beaucoup moins de soucis.