Projet de loi sur l’abattage rituel et préjugés

Lorsque Brigitte Bardot a lancé sa campagne contre l’abattage rituel, nous avons dit que c’était absurde, car il fallait mener campagne contre l’abattage en général, alors que là en ciblant deux religions, cela ne pouvait que contribuer au racisme.

Voici, à titre illustratif, une interview de Nicolas Dhuicq, parue dans le magazine Valeurs Actuelles (du 2-9/12/2010).

Valeurs actuelles, qui tire à 90.000 exemplaires, est un magazine ultra conservateur, grosso modo entre Sarkozy et Le Pen, et est destiné à un public « ciblé » et très grand bourgeois (le taux d’abonnement est de plus de 90%!).

Nicolas Dhuicq, lui, est un député UMP qui s’est occupé de la proposition de loi pour que soit indiqué à l’achat les « viandes » en provenance d’abattoirs pratiquant l’abattage rituel.

Et l’on voit très bien ici comment la campagne contre l’abattage halal a comme arrière-plan nullement la question des animaux, mais celle de « l’immigration » pris au sens très large et de manière démagogique.

On voit tout de suite que Nicolas Dhuicq ne s’intéresse pas du tout aux animaux ; il parle même de « l’abattage de la viande » (sic!).

A la suite de cette interview nous publions d’ailleurs un extrait d’une interview de Nicolas Dhuicq au journal d’extrême-droite « Minute », montrant bien comment il y a ici une véritable idéologie… sur le dos de la question de la souffrance animale.

Vous venez de déposer une proposition de loi visant à informer le consommateur en cas d’abattage rituel des viandes. Pourquoi ?

Il y a plusieurs axes de réflexion. Tout d’abord, le droit français et européen demande que l’animal soit étourdi. Il y a une dérogation pour la pratique religieuse, mais elle ne doit pas devenir la règle. Ensuite, le niveau d’animaux abattus est beaucoup plus élevé que le niveau de consommateurs.

La liberté de conscience et l’information du consommateur imposent donc une nouvelle réglementation car il y a forcément des morceaux qui se retrouvent dans l’assiette de personnes agnostiques, athées, pratiquant une autre religion et qui ne souhaitent pas consommer une viande abattue de façon rituelle.

Concrètement, comment imaginez-vous l’application de ce principe ?

Les viandes ont déjà une traçabilité car nos abattoirs suivent des règles d’hygiène très strictes. Il suffira donc d’ajouter la mention « abattage rituel » ou « viande abattue rituellement. » Chacun doit pouvoir faire son choix en connaissance de cause.

Cet état de fait pose d’ailleurs un problème par rapport à la séparation de l’Eglise et de l’Etat, étant donné la rémunération de l’imam pour effectuer la prière rituelle lors de l’abattage de la viande.

Voici maintenant la réponse de Nicolas Dhuicq à une question du journal d’extrême-droite « Minute », suite à l’affaire des prières dans les rues parisiennes « dénoncées » par Marine Le Pen.

« Le phénomène s’étend car notre appareil législatif et notre système de pensée gréco-latine et de culture judéo-chrétienne se trouvent confrontés à un système englobant, qui est l’islam. Le grand défi, c’est de savoir si nous serons en mesure de laïciser l’islam et les musulmans de France.

L’ennui, c’est qu’avec la manie de la repentance, l’effondrement du système scolaire – notamment dans l’enseignement, fondamental, de l’histoire de France – et l’affaiblissement du cadre républicain, nous faisons face à des populations que nous avons laissées se replier sur des pratiques communautaires.

Ajoutez à cela des flux migratoires très importants, et notre appareil d’Etat se retrouve défié par un islam politique conquérant, que l’on retrouve dans les prisons, dans l’espace public avec les interdits alimentaires et la pratique aussi ostentatoire qu’illégale de la pratique d’un culte en pleine rue. »

Comme on le voit, la question de l’abattage est considérée comme une question « alimentaire » et surtout idéologique par la droite et l’extrême-droite. Ce qui est visé, c’est ce qui est censé être une « invasion » religieuse musulmane.

Rien à voir avec la question de la souffrance animale…

Une nouvelle offensive du « Centre d’Information des Viandes »

Hier, 22 septembre 2010, un journal gratuit tirant à 400.000 exemplaires a été diffusé en région parisienne avec une couverture très particulière et ayant un écho certain sur le net.

Il s’agit en fait de la dernière initiative du « Centre d’Information des Viandes » qui est une véritable machine de propagande au service de l’industrie dont nous avions déjà parlé (voir nos articles La propagande du Centre d’information des viandes et La campagne « Le boeuf, bon par nature »).

On l’aura compris, cette publicité dans Direct Matin fait directement allusion à Lady Gaga. Celle-ci en effet est arrivé au début de ce mois au MTV Video Music Awards 2010 avec une robe… en « viande ».

Voici les propos à ce sujet du « styliste » Franc Fernandez, qui l’a « cousu » (voir ici les photos en détail de la robe en « viande »):

« J’ai été contacté par la styliste personnelle de Lady Gaga pour fabriquer cette robe, en m’inspirant du shooting pour le Vogue japonais où elle posait déjà avec de la viande. J’ai été acheté de la viande de race argentine chez mon boucher traditionnel, à Los Angeles, et j’en ai pris pour environ 23 kilos. La robe devait peser au moins 15 kilos au final.

La robe a été cousue puis réfrigérée dès qu’on pouvait pour garder la viande fraîche. J’ai tout de même dû coudre quelques morceaux une fois que Lady Gaga l’avait enfilée en coulisses. C’est une robe qui n’est destinée à être portée qu’une fois, car la viande va s’assécher et devenir dure. »

Toutefois l’initiative du « Centre d’information des viandes » est plus claire quand on voit ce qu’il y a au dos de la couverture du Direct Matin.

Il s’agit en fait de la promotion du site internet « kitchen music. » Le principe est simple : il s’agit d’un site internet avec des recettes qui sont proposées, après le choix entre plusieurs critères (le temps, le budget, l’humeur, etc.), sous la forme d’une émission de radio en ligne.

On peut alors cuisiner, en écoutant les consignes ainsi que de la musique.

Parmi les « chefs » on retrouve bien entendu Abdel Alaoui (voir son blog), qui fait office de monsieur gastronomie sur Canal + (« les recettes d’Abdel« ) après avoir effectué le parcours parfait du cuisinier carriériste au service des riches carnivores. Son « crédo » sur le site kitchenmusic est d’ailleurs: « Si y a pas de viande, y a pas de plaisir »…

Ce cuisinier se met en avant comme « branché » tout en jouant sur un côté comédien, et il est donc très utile à l’industrie de la viande qui se la joue « moderne » et « jeune. »

Le site kitchen music met d’ailleurs en avant des « oeuvres artistiques » d’un goût plus que morbide… mais qui sont tout à fait dans l’esprit morbide et décadent de la jeunesse « rock’n roll » des beaux quartiers.

Le site propose également de gagner des T-shirts, où l’on peut lire des slogans comme « porc favor », « viva el che-val » (allusion à Che Guevara), « Yes we tripes », etc.

Branchitude et marketing: l’industrie de la viande sait qu’en s’imposant dans la culture bobo, elle renforce sa position. Elle sait aussi que rien ne va mieux avec la mise en avant du « traditionnel » que le culte de la « modernité » débridée et sans contenu.

Si l’on ne comprend pas le sens de cette rencontre improbable, on ne peut pas saisir pourquoi l’alimentation de type McDonalds ou Quick d’un côté, et les orientations de type Halal ou cacher ou « jambon-beurre » de l’autre, sont des phénomènes se nourrissant l’un l’autre.

L’ultra-moderne produit une réaction de retour au terroir, réaction qui valorise inversement l’ultra-moderne en tant que seule « actualité »… On est alors obligé de choisir entre la peste et le choléra (voir nos articles Quick, halal ou pas, on en veut pas! et Petit retour sur le Quick Halal – à Lyon cette fois).

Cela ne peut que souligner la nécessité d’une culture végane forte, totalement alternative, et irréductible dans son identité fondée sur la libération animale et la libération de la Terre!

Des antispécistes s’invitent à la fête des bouchers d’Ile de France !

Nous parlions du Barbecue géant à Paris dans un article il y a quelques jours; des activistes se sont invités à cette triste « fête. » Voilà leur compte-rendu, alors que des photos sont disponibles ici.

Aujourd’hui avait lieu sur le parvis de l’Hôtel de Ville de Paris un barbecue géant et gratuit organisé par les fédérations des boucheries d’Ile-de-France et sponsorisé (entre autres) par la Ville de Paris, la région Ile de France, le Centre d’Information des Viandes (le CIV) qui depuis la rentrée mène sans vergogne une campagne pro-viande en s’introduisant directement dans les établissements scolaires.

Ce dimanche, le parvis de l’Hôtel de ville avait donc été transformé en boucherie géante. Au programme, le sacrifice de trois bœufs, un veau et dix agneaux rôtis sur place, une grande dégustation de cadavres, des stands de propagande niant l’exploitation et la souffrance engendrées par la consommation de viande.

Un bel endoctrinement pro-viande qu’une dizaine d’antispécistes ne pouvaient pas laisser passer sans réaction.

Pendant 45 minutes nous avons occupé le terrain, nous postant au beau milieu du parvis avec nos panneaux « Viande = meurtre », « Abolition de la viande », « Non à la peine de mort » et des centaines de tracts « Pourquoi refuser de manger la viande ? », « La place accordée aux animaux » du réseau antispéciste et « Abolissons la viande. »

Aussitôt arrivé-e-s, nous nous sommes placé-e-s entre la rôtisserie géante et la tonnelle de dégustation. Nous avons eu la chance d’arriver juste au moment de la cérémonie de remise des diplômes d’artisans bouchers et de la séance photos, détournant aussitôt une nuée de photographes vers nos panneaux.

Le timing était parfait ! Malgré plusieurs provocations verbales proches du ridicule, des discussions constructives ont eu lieu.

Après 45 minutes de présence, la police, appelée à la rescousse par les organisateurs nous a gentiment demandé de partir avant d’être convié-e-s au commissariat. Nous avons préféré obtempérer. Bref, une action courte mais loin d’être inutile : nos panneaux ont été vus par des centaines d’individus, notamment par les apprentis bouchers qui posaient pour les photographes (!), par leur famille et par le nombreux public qui se trouvait là.

Merci aux antispécistes qui ont « participé » à la fête. Nous pensons qu’il est important  de montrer notre mécontentement lors de telles occasions.