La nécessité de changer le monde

Est-il possible d’avoir des revendications en faveur des animaux, dans une société dont l’économie s’appuie notamment sur l’exploitation animale, où les mentalités sont particulièrement rétrogrades en ce qui concerne la Nature?

A cela s’ajoute une question : qui sont les gens susceptibles de soutenir au moins en partie ces revendications?

Prenons l’exemple de la vivisection. Son abolition est au coeur de toutes les personnes aimant les animaux. Pourtant, on ne peut pas réclamer son abolition dans cette société, sans prétendre diffuser une illusion nocive aux animaux.

On le voit bien : l’Union européenne a prétendu refuser l’expérimentation animale pour les cosmétiques… Tout en organisant un projet de tests chimiques, appelé « Reach », fondé précisément sur l’expérimentation animale.

L’expérimentation animale est systématiquement présentée comme incontournable, impérativement nécessaire pour la recherche, etc. Il y a ici un véritable mur, une barrière complète. En prétextant servir le progrès, c’est en réalité la barbarie qui est défendue.

Le tout, comme on le sait, dans la plus totale opacité. Tant les institutions publiques que privées, les expérimentations sont masquées, elles se déroulent dans le secret. C’est totalement anti-démocratique et cela en dit long sur les mentalités rétrogrades de ces gens.

L’expérimentation sur les animaux est un crime organisé de manière industrielle et on ne peut pas demander à des gangsters de cesser leurs activités. On doit mener campagne contre l’expérimentation animale, mais sans avoir l’illusion qu’au sein d’une société comme la nôtre, cela puisse être aboli.

On notera d’ailleurs au passage que les institutions, tant françaises que l’Union européenne, sont très contentes des pétitions et autres revendications, qui ne font que renforcer les illusions démocratiques à leur sujet…

Il est tout de même symptomatique qu’à une époque où plus personne n’a confiance en les institutions, les réformistes de la protection animale jouent la carte du légalisme à tout prix…

Il y a pourtant des revendications qui, inversement, peuvent triompher. Aussi paradoxal que cela puisse avoir l’air, l’abolition de la chasse en est une.

La chasse ne concerne qu’une faible partie de la population, c’est une pratique méprisée par les gens tournés vers la culture, sans parler de ceux aimant les animaux. Se balader en forêt est pratiquement impossible sous la pression des chasseurs qui considèrent que c’est leur territoire.

Bien sûr, les chasseurs pratiquent la violence, le lobbying, ils jouent sur la carte du terroir, des traditions, etc. La réponse est alors simple : il faut avoir une contre-violence, jouer sur la carte du progrès, de la civilisation.

Et c’est une question de message aussi : les chasseurs ont un rapport perverti à la Nature, un certain nombre serait d’accord de troquer leur fusil contre un appareil photo. Au lieu d’un animal mort tué par un obscur chasseur un jour dans l’année, il y aurait le prestige de traverser le temps comme l’auteur d’un merveilleux portrait de la Nature…

Il suffit de feuilleter les magazines de chasse pour voir qu’à l’arrière-plan, ce qui convainc les chasseurs, c’est le rapport à la Nature, c’est le besoin de rester connecté à elle. Le discours sur le terroir est vraiment d’extrême-droite : il parle de Nature, mais pour en dévoyer le besoin…

Naturellement, la question d’une réelle application d’une éventuelle interdiction de la chasse demanderait des moyens que la société actuelle n’est pas prête à donner. Mais, dans tous les cas, on ne peut pas échapper à la nécessité de la révolution pour changer le monde…