Ce qui est vraiment frappant, c’est à quel point la société ne fait même pas semblant d’aller dans le sens de l’écologie. Il suffit de lire la presse pour voir à quel point les choses avancent… pour reculer.
Voici deux exemples pathétiques. Le premier concerne l’interdiction des terrasses chauffantes, le second la loi sur la biodiversité. Dans les deux cas, cela fut un pas en avant, deux pas en arrière.
Voici ce que Le Parisien constatait hier, dans son article La justice autorise les contre-terrasses chauffées :
Non, les contre-terrasses des bars et restaurants de la capitale ne sont pas interdites de chauffage ! C’est du moins ce qu’a jugé, vendredi dernier, le tribunal administratif de Paris, après l’examen du dossier présenté par la propriétaire de l’établissement les Patios, un établissement de la place de la Sorbonne (Ve).
La décision, qui vient contredire un arrêté municipal de mai 2011, interdisant de chauffer ces espaces — généralement situés en vis-à-vis des brasseries, un peu à l’écart de l’établissement dont ils dépendent — devrait, à l’évidence, faire jurisprudence.
Et concerner des centaines de cafés parisiens. « Cette décision, détaille Me Philippe Meilhac, l’avocat des Patios, s’applique à tous les titulaires de l’autorisation d’exploitation d’une contre-terrasse, qui peuvent désormais utiliser du chauffage, qu’elle que soit la période de l’année. »
La Ville de Paris, qui devrait faire appel de cette décision, plaide son côté, la dangerosité des dispositifs de chauffage pour la sécurité des consommateurs, et leur incompatibilité avec la préservation de l’environnement… Des arguments qui n’ont pas convaincu la justice.
« En l’absence de tout élément de nature à démontrer ce qui est avancé, l’article du règlement des étalages et terrasses prévoyant une interdiction totale de tout dispositif de chauffage sur les contre-terrasses, est entaché d’illégalité », tranche le tribunal administratif.
Précisant également que les Patios sont déchargés des 28 589 € qui étaient réclamés à l’établissement par la Ville de Paris, au titre de la taxe sur le chauffage… pourtant interdit par l’arrêté !
La triste blague dans cette histoire, c’est que les terrasses chauffantes n’ont de toutes manières jamais cessé d’exister à Paris…
Voici également ce que Le Monde constate dans son article « Biodiversité : le Sénat vote une loi écornée par le lobby des chasseurs » :
Des reculs importants sur la chasse ou les néonicotinoïdes
A côté de ces avancées, le texte issu des travaux du Sénat affiche aussi d’importants reculs.
« Il s’agit, au final, d’un texte très hétérogène, commente Ronan Dantec (Loire-Atlantique), chef de file du groupe écologiste. Nous avons obtenu de vraies victoires pour la protection de la biodiversité, mais le lobby des chasseurs, des agriculteurs et des industriels reste très organisé au Sénat. » De fait, le groupe d’études chasse et pêche de la chambre haute, qui transcende les courants politiques, compte 84 membres, sur 348 sénateurs, qui se sont montrés extrêmement actifs tout au long des débats.
C’est ainsi que l’interdiction de la chasse aux oiseaux à la glu ou à la colle, approuvée par les députés, a disparu. De même que l’interdiction de chasser les mammifères en période de reproduction. Ainsi encore que l’autorisation du chalutage en eaux profondes – une pratique dévastatrice pour la faune et les fonds marins –, qui avait été supprimée par la commission du développement durable du Sénat, et qui a été rétablie.
Une autre régression marquante concerne les néonicotinoïdes, ces pesticides reconnus nocifs pour les insectes pollinisateurs et, plus généralement, pour l’environnement et la santé. Les députés avaient voté leur interdiction à compter du 1er janvier 2016. Les sénateurs sont revenus sur cette mesure. Il est seulement prévu que le ministre de l’agriculture prenne, dans les trois mois suivant la promulgation de la loi, un arrêté déterminant « les conditions d’utilisation » de ces substances chimiques. Cela, en tenant compte des « conséquences sur la production agricole », ce qui augure mal d’un bannissement de ces produits.
En conclure que les lobbies ont imposé leur loi serait excessif. « Une frange de sénateurs, notamment pro-chasse, mène un combat de fond contre la loi, mais une partie de leurs amendements a été retoquée, note Christophe Aubel (Humanité et biodiversité).
Dans la plupart des groupes, les rapports de force sont différents de ceux d’il y a quelques années. Une part importante des sénateurs ont compris que l’avenir de la biodiversité est aussi celui des sociétés humaines, bien au-delà de simples histoires de fleurs et d’oiseaux. »
On remarque comment l’article tente tout à fait classiquement de relativiser le poids du « lobby » de la chasse. Alors que tout ce qui est raconté ici est tout à fait clair et devrait être totalement dénoncé. Rompre avec tout cela est une nécessité. On voit bien que par « respect » des valeurs dominantes et des institutions, le pas n’est ici pas franchi par Le Monde, ou encore Le Parisien…