Cannabis : Terra Nova veut que soit repris le modèle des jeux d’argent

Il était évident que la fondation Terra Nova intervienne en cette rentrée. Il s’agit en effet du principal think tank bobo, qui dit que la gauche doit abandonner les couches populaires pour se tourner justement vers ce qui est bobo.

Inévitablement, le cannabis est un thème très important, au coeur du processus de libéralisme-libertaire censé façonner la société. Et il faut pour ces gens accélérer la propagande en faveur de la légalisation du cannabis, en vue des présidentielles…

Terra nova avait déjà pris partie en décembre 2014, et recommence avec un nouveau rapport, dont le titre éloquent est pas moins que « Contrôler le marché légalisé du cannabis en France – L’EXEMPLE FONDATEUR DE L’ARJEL – ».

Il est intéressant de voir que rien que le titre aurait amené une répression policière il y a quelques années : c’est à ce genre de détails qu’on reconnaît aussi les avancées du libéralisme, de l’indifférence, du capitalisme partant à la conquête d’un nouveau marché.

Terra nova ne s’en cache d’ailleurs pas : son but est de contribuer à la possibilité de l’ouverture d’un nouveau marché. Son idée est que pour le cannabis, il faut suivre le modèle de l’ARJEL, c’est-à-dire l’Autorité de régulation des jeux en ligne.

La logique de ces décadents est implacable : les jeux d’argent étaient interdits, on les as légalisés, donc faisons pareil. Voici l’argumentaire :

« En effet, le marché des jeux d’argent et de hasard en ligne a été légalisé en France par la loi 2010-476 du 12 mai 2010.

Elle légalise l’offre d’un bien potentiellement addictif et dépénalise de fait une industrie autrefois considérée comme illégale. »

Quant au reste, tout y passe. La légalisation des jeux d’argent et de hasard aurait asséché le marché illégal (alors qu’en réalité il a décuplé cette addiction!), cela serait pareil pour le cannabis.

Cela rapporterait de l’argent qu’on pourrait mettre dans la santé, cela aiderait la santé publique en encadrant le phénomène, cela libérerait la police qui est débordée, etc.

Toute la démagogie de ces derniers temps est livrée dans une sorte de package qui, on le devine, va être répété à l’infini. Avec, toutefois, un côté toujours plus concret : les libéraux-libertaires vont toujours plus loin dans les propositions concrètes. Voici ce qu’on lit, qui est très instructif :

« La mise en production de cannabis pourrait soit se faire par des agriculteurs français autorisés par des licences du Ministère de l’agriculture, soit par des entreprises étrangères.

Dans le premier cas, rappelons que la France était le premier producteur européen de chanvre en 2005 (Commission européenne, 2005) et qu’elle a un historique relativement important dans la culture de cette plante (Dufour, 1961).

Evidemment, le chanvre industriel cultivé en France ne présente pas les caractéristiques toxicologiques du cannabis recherché par les actuels consommateurs : le niveau de THC et des CBD et CBN présentés par ces productions ne sont pas de nature à permettre l’ivresse cannabique.

Avec le savoir-faire et les connaissances scientifiques en toxicologie et avec l’appui de l’INRA, il serait cependant relativement aisé de développer en France une production de cannabis, d’autant plus qu’existe une Coopérative Centrale des Producteurs de Semences de Chanvre et que cela fournirait un nouveau débouché à l’agriculture française.

Cette proposition de faire participer le secteur agricole national à une légalisation du cannabis est déjà exploitée en Suisse (Wavre, 2016). (…)

La vente de cannabis serait confiée à des détaillants ayant demandé un agrément à l’ARCA. De la même manière que pour la production, la vente respecterait une charte établissant les modalités de vente, de prévention et de réduction des risques à engager auprès des acheteurs.

Traçabilité et contrôle du débit des ventes par système informatique (comme c’est le cas des jeux d’argent et de hasard en ligne) garantiraient le système de distribution.

Trois options potentiellement complémentaires sont ici à considérer : le réseau des débitants de tabac pourrait être sollicité, celui des officines pharmaceutiques également ou un nouveau réseau de magasins pourrait voir le jour. Toutes ces options présentent avantages et inconvénients.

Les débitants de tabac ont l’avantage de pouvoir être rapidement sollicités et équipés pour une vente contrôlée de cannabis mais les compétences préventives et sanitaires peuvent leur faire défaut.

Ceci n’est pas le cas des pharmacies mais voudront-elles vendre un produit pour un usage récréatif, c’est- à-dire sortir quelque peu de leur cœur de métier ?

Finalement, un nouveau type de magasin, spécialisé dans la vente de cannabis, pourrait demander agrément à l’ARCA. Il présenterait l’avantage d’un contrôle territorial de l’implantation de ces magasins, en plus de créer de l’emploi. En revanche, son contrôle serait certainement plus compliqué à mettre en œuvre par comparaison aux deux autres réseaux cités. »

Pourquoi ces gens pensent-ils, écrivant des choses qui auraient été illégales il y a ne serait-ce que dix ans ? Parce qu’ils savent que la légalisation du cannabis a été décidée par l’économie, que les gens sombrent dans l’indifférence, qu’il n’y a donc plus qu’à travailler l’opinion publique et faire tomber la barrière des réticences et du refus.

Un refus capital : la bataille contre le cannabis, contre sa légalisation, doit être au coeur de toutes les personnes refusant le relativisme social, l’acceptation des « paradis artificiels » en général, le repli individualiste dans le mépris des autres et d’une vie naturelle, heureuse.