« Le Nord et l’écologie »

Rien n’est possible sans continuité et sans ancrage local. On peut tenter de contourner cela comme on veut, mais en définitive on n’y coupe pas: pour pouvoir s’adresser aux gens, il faut… les connaître, et disposer d’une crédibilité certaine.

Cela prend du temps, cela demande du travail; cela signifie ouvrir des perspectives, se remettre en cause, étudier la réalité concrète et être capable d’en déceler les possibilités.

Voici un nouvel exemple de cette question d’ancrage locale avec un article de l’amicale progressiste, de Lille.

Il y a quelques jours sortait le classement 2014 des départements selon plusieurs critères écologiques. Le classement est établi par le magazine La Vie et, sans prendre tout ce qui y est affirmé pour argent comptant, il est intéressant de voir ce qui y est dit.

Tout d’abord, l’étude montre que l’année dernière, avec sensiblement les mêmes critères, le Nord se trouvait à la 38e place (sur 94 départements) alors qu’il a, cette année, régressé à la 47e place. Voyons comment cela se traduit au niveau des différents critères pris en compte.

Commençons par la qualité de l’air (avec 11 indicateurs) et la qualité de l’eau (l’eau de consommation mais aussi les eaux de baignade et des milieux naturels). L’année dernière, le Nord se trouvait à la 92e place pour la qualité de l’eau, tout comme cette année.

Pour ce qui est de la qualité de l’air, notre département se trouvait à la 86e position en 2013 tandis qu’en 2014, il descend à la 92e position. Avec les seules données disponibles, il est difficile de dire si ce résultat est dû à une dégradation de la qualité de l’air ou si d’autres départements ont amélioré la leur, entraînant, de fait, la baisse de la note du Nord.

Cependant, on ne peut pas discuter le fait que les résultats du Nord soient désastreux dans ce domaine. Cela montre évidemment l’héritage de la forte industrialisation du département. Mais cela résulte aussi probablement de l’agriculture intensive, car bien qu’on y pense pas tout de suite, le Nord est une région d’agricole.

On peut également évoquer le tissu urbain dense mais aussi l’étalement urbain et, par conséquent, une pollution importante par les gaz d’échappement. De plus, le Nord étant à l’intersection de la Belgique, de l’Angleterre et de Paris, il constitue un axe de transport très fréquenté.

Parallèlement à cela, il y a une mesure de la production d’énergie renouvelable. Alors que notre département était en 4e position l’année dernière, il chute à la 21e cette année. Que signifie cette dégringolade ? Tout d’abord, on peut remarquer qu’il y a eu un changement des critères d’évaluation.

Mais ces critères concernent tous les départements. Peut-être d’autres départements ont fortement développé leurs dispositifs de production d’énergie renouvelable. Ou peut-être y a-t-il eu un véritable renoncement de ce côté. Pour en savoir plus, il faudrait étudier plus précisément l’état des lieux dans notre département.

Pour revenir à l’héritage de l’industrialisation du Nord, un autre critère donne des indications : la gestion des déchets. Dans ce classement, la gestion des déchets est mesurée par la collecte et la valorisation des déchets ainsi que par la gestion des sites pollués. Cette année, tout comme l’année dernière, le Nord est en 88e place.

Ce mauvais résultat peut donc être imputé à une mauvaise gestion des sites pollués (comme les anciens sites industriels) mais pose aussi la question de la collecte des déchets. Ce dernier point demande une étude sérieuse du business juteux des déchets et de la propreté.

Par contre, un autre critère tend à montrer que la pollution liée à l’agriculture pourrait baisser à l’avenir. Alors que, l’année dernière, notre département était classé en 81e place pour le développement de l’agriculture biologique, il atteint maintenant la 60e place.

De tous les critères, c’est celui pour lequel le Nord progresse le plus. Toutefois, il faudrait étudier quels sont les critères pour être certifié biologique. Mais ce résultat reste intéressant car il montre que, puisque l’agriculture biologique se développe, c’est que de plus en de gens consomment des produits biologiques.

Ce point est d’ailleurs renforcé par le critère de consommation durable. Il évalue le nombre d’AMAP (Associations pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne) et la part de consommation de produits locaux. Alors que notre département était à la 6e place l’année dernière, il est à la 5e place cette année. Malgré la faible progression, le Nord reste en tête dans ce domaine.

Là encore, cela traduit l’engouement des nordistes pour l’agriculture biologique mais aussi pour les produits locaux. Finalement, cela montre que l’agriculture intensive – comme le sucre Beghin-Say par exemple produit à partir de betteraves à Escaudœuvres – a permis de favoriser les circuits courts.

En plus de tous ces critères, la protection de la biodiversité est évaluée. Ce critère est composé de nombreux indices : pourcentage d’espaces protégés, abondance des oiseaux communs, abondance moyenne de papillons par jardin, taux de participation aux observatoires naturalistes et grand public et pourcentage de sols artificialisés.

Pour ce critère, le Nord est passé de 2e l’année dernière à 6e cette année. Malgré une perte de 4 places, le Nord reste plutôt en bonne position.

Les nombreux éléments pris en compte font qu’il est difficile de voir ce qui est en progression ou en régression. Cependant, le fait de mesurer le taux de participation aux observatoires est intéressant dans la mesure où un taux important traduirait un intérêt certain pour le sort des animaux. Ce qui serait une dimension très positive. Mais il est impossible de tirer de telles conclusions uniquement avec les données de cette étude.

Enfin reste le critère est dit « Agenda 21 ». Ce critère évalue les politiques locales de développement durable. Tandis qu’en 2013, le Nord se trouvait en 4e position, cette année, il est en 7e position. Concernant ce critère, on peut se demander à quel point il est significatif vu les scores très bas obtenus pour la qualité de l’eau et de l’air et la gestion des déchets ainsi que les scores en forte baisse de la production d’énergie renouvelable. Là encore, cela demande un exmane plus attentif.

En conclusion, l’étude ne dépeint pas un tableau favorable à l’écologie dans le Nord. C’est d’autant plus regrettable que le Nord est le premier département, avec le Pas-de-Calais, à avoir eu une présidente du conseil régional, Marie-Christine Blandin, qui faisait partie d »un parti écologiste, Les Verts.

L’étude montre donc les points faibles et les défis que le Nord doit encore relever. Mais elle montre aussi des aspects positifs, des pistes sur lesquelles le Nord peut s’appuyer pour développer encore plus l’écologie.