Rapport européen 2018 sur les drogues : ce que cela dit sur la France et le cannabis

L’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies a rendu public hier son nouveau rapport et, comme c’est l’habitude, en voici une présentation, cette fois par contre une tentative de présenter un certain arrière-plan par rapport à la légalisation du cannabis clairement programmée par l’Etat.

Cela ne doit pas occulter le fait qu’il existe une progression très nette de la cocaïne en France.

Un autre aspect est le nombre toujours plus grande de drogues différentes disponibles par les marchés illégaux. Plus de choix, davantage de disponibilité…

Et également une présence toujours plus réelle dans la vie quotidienne. Voici un aperçu rapide sur cette question, avec quelques chiffres concernant l’Union Européenne.

Or, cela montre bien qu’il existe une grande différence selon les pays dans la consommation de drogues. Ces dernières ne sont pas naturelles, elles sont le produit de l’histoire, celui des traffics, des productions possibles, des modes, etc.

Voici les stimulants les plus saisis comme illustration. C’est très différent selon Les pays.

Et donc, regardons justement notre pays où justement 41% des adultes ont déjà consommé du cannabis, avec les saisies de résine et d’herbe de cannabis. La France, tout le temps présentée comme ultra-répressive, ne l’est en fait pas du tout.

La quantité de résine saisie, ce n’est même pas la moitié de l’Espagne, le nombre de saisies d’herbe, c’est à peine un peu plus de deux fois qu’en Autriche, pays de même pas 9 millions d’habitants!

Vérifions bien cette absence de réelle répression en s’attardant sur le degré de consommation chez les jeunes adultes. Plus il y a prévalence, plus il y a mécaniquement possibilité de saisies.

Pour la Suède  et la Norvège, malgré une consommation chez les jeunes plus faibles qu’en France, il y a donc proportionnellement bien plus de saisies… Et on peut voir qu’en Italie la situation est encore pire qu’en France sur le nombre de saisies, pour une même prévalence du cannabis.

Autre exemple de capitulation, l’évolution des consommateurs de cannabis admis en traitement, sur les dix dernières années. Il y a une explosion du nombre d’admission… Ce qui est logique. S’ancrant socialement, il y a désormais des fumeurs au quotidien…

Ce qu’on peut voir par conséquent, c’est qu’il n’y a pas que le libéralisme qui fait que le cannabis s’installe. Il y a également un effondrement sur le plan de la civilisation.

La légalisation du cannabis n’est pas qu’un je-m’en-foutisme, c’est également une capitulation devant la drogue comme phénomène de masse.

C’est finalement, toutes proportions gardées, le même phénomène qu’aux Etats-Unis.  Mais c’est la même décadence, le même anéantissement des structures sociales, avec les mafias exerçant une pression terrible, un véritable cannibalisme social.

Ce qui fait que si jamais quelqu’un conçoit l’idée de révolution, il sera toujours plus obligé d’intégrer l’affrontement total avec les mafias et les drogues dans sa vision des choses.

Le marché et la criminalité de la drogue en France en 2017

Voici la présentation du marché et de la criminalité de la drogue en France l’année passée, 2017, par l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies. Un dossier plus approfondi est téléchargeable ici.

L’herbe de cannabis est la seule substance illicite dont on observe la production en France. Alors que la culture d’herbe était majoritairement le fait de petits cultivateurs autosuffisants, la situation a commencé à changer, à partir de 2011, avec l’apparition de cannabis factories tenues par le crime organisé et l’investissement de particuliers dans la culture commerciale.

La France, compte tenu de sa position géographique au cœur de l’Europe occidentale, est une zone de transit pour les principales substances illicites (cannabis, cocaïne, héroïne, drogues de synthèse) produites dans le monde.

Elle l’est aussi par ses départements d’outre-mer situés sur le continent américain (Guadeloupe, Martinique et Guyane) à proximité des grandes zones de production et de transit de la cocaïne (Colombie, Venezuela).

La résine de cannabis consommée en France provient du Maroc, le plus souvent via l’Espagne tandis que l’herbe de cannabis provient principalement d’Espagne, des Pays-Bas et de Belgique. De nouvelles routes de trafic émergent, par l’intermédiaire de la Libye pour la résine de cannabis et de l’Albanie pour l’herbe de cannabis.

La cocaïne consommée en France provient essentiellement de Colombie. Elle transite essentiellement au sud par l’Espagne et au nord par les Pays-Bas (Rotterdam) et la Belgique (Anvers).

Depuis quelques années la cocaïne, transitant par le Vénézuela, puis les Antillles françaises, pénètre sur le continent européen par le port du Havre. Depuis deux ans, le trafic de « mules » empruntant la voie aérienne entre la Guyane et la métropole est aussi en forte augmentation.

L’héroïne consommée en France provient majoritairement d’Afghanistan (héroïne brune) et transite via la route des Balkans (Turquie, Grèce, Albanie). Les Pays-Bas, devant la Belgique, sont la plate-forme principale où les trafiquants français s’approvisionnent.

Les drogues de synthèse (MDMA/ecstasy, amphétamines) consommées en France proviennent également principalement des Pays-Bas.

En 2016, le nombre total de personnes mises en cause pour usage de stupéfiants en France est d’environ 160 000.

En dehors de ces infractions pour usage (83 % de l’ensemble), les services de la police et de la gendarmerie ont mis en cause 16 487 personnes pour usage-revente et 13 515 pour trafic-revente sans usage de stupéfiants. En 2010, 90 % des interpellations concernaient l’usage simple de cannabis, 5 % celui d’héroïne et 3 % celui de cocaïne.

Le plan gouvernemental de lutte contre les drogues et les conduites addictives 2013-2017 (MILDT 2013), et sa déclinaison dans le Plan d’actions 2016-2017 (MILDECA 2016), comprend un axe relatif à l’intensification de la lutte contre le trafic, avec les objectifs principaux suivants : Agir en amont des trafics : notamment en renforçant la coopération internationale et les capacités de contrôle, et en mutualisant les renseignements ; en renforçant la lutte contre le blanchiment des capitaux illicites et l’approche patrimoniale des enquêtes judiciaires ; en intensifiant la lutte contre la cannabiculture ; en accroissant la surveillance de l’utilisation du vecteur Internet et la lutte contre l’offre de produits illicites en ligne; en coupant les routes du trafic international de cannabis et de cocaïne en Méditerranée et dans la mer des Antilles.

Rapport 2016 de l’Observatoire Européen des drogues et des toxicomanies

L’Observatoire Européen des drogues et des toxicomanies vient de rendre public son rapport 2016. L’importance économique du marché des drogues est évalué de la manière suivante :

« Une estimation prudente évalue le marché de détail des drogues illicites dans l’Union européenne à 24,3 milliards d’EUR en 2013 (fourchette probablement comprise entre 21 et 31 milliards d’EUR).

Les produits du cannabis constituent l’essentiel du marché des drogues illicites en Europe, leur valeur au détail étant estimée à 9,3 milliards d’EUR (fourchette probablement comprise entre 8,4 et 12,9 milliards d’EUR) soit environ 38 % du marché total.

Ils sont suivis par l’héroïne, dont la valeur est estimée à 6,8 milliards d’EUR (6,0 à 7,8 milliards d’EUR) (28 %) et par la cocaïne, avec une valeur estimée à 5,7 milliards d’EUR (4,5 à 7,0 milliards d’EUR) (24 %).

Les amphétamines représentent une part plus modeste du marché, estimée à 1,8 milliard d’EUR (1,2 à 2,5 milliards d’EUR) (8 %), devant la MDMA/ecstasy, dont la valeur atteint près de 0,7 milliard d’EUR (0,61 à 0,72 milliard) (3 %).

Ces estimations reposant sur des données très limitées, il a été nécessaire de formuler des hypothèses assez approximatives; elles doivent donc être considérées comme une base minimale qui devra être révisée à mesure que les informations sur lesquelles elle repose s’affineront. »

L’un des points essentiels est la « résurgence de la MDMA », présentée comme suit :

« Le retour de la MDMA qui est un stimulant couramment apprécié des jeunes illustre quelques-uns des nouveaux défis posés par le marché actuel de la drogue. L’innovation dans l’approvisionnement en précurseurs, les nouvelles techniques de production et l’offre en ligne semblent toutes encourager la reprise sur un marché désormais caractérisé par la diversité des produits.

Des poudres, cristaux et comprimés fortement dosés, avec toute une série de logos, de couleurs et de formes, sont disponibles, de même qu’une production à la commande et un recours à un marketing sophistiqué et ciblé.

Il pourrait s’agir d’une stratégie délibérément mise en œuvre par les producteurs afin d’améliorer la réputation de cette drogue après une longue période pendant laquelle sa piètre qualité et son adultération se sont traduites par une diminution de sa consommation. Certains éléments indiquent que cette stratégie pourrait se révéler payante, la MDMA/ecstasy semblant gagner en popularité, tant auprès des consommateurs de stimulants classiques qu’auprès d’une nouvelle génération de jeunes usagers. »

Voici, enfin, une présentation statistique des usagers des principales drogues.