Pourquoi Brigitte Bardot a-t-elle choisi Laurence Parisot?

Les personnes observatrices l’auront remarqué : Laurence Parisot signe régulièrement des tribunes pour les animaux, dont par exemple celle contre la chasse à courre.

Cela peut surprendre parce que, après tout, elle est surtout connue pour avoir été la présidente du Medef, le « syndicat des patrons », de 2005 à 2013, dont elle est encore la présidente d’honneur par ailleurs.

Mais c’est en fait qu’elle a été choisir par Brigitte Bardot pour prendre, après son décès, la tête de la Fondation Brigitte Bardot. Elle n’a pas encore été officiellement adoubée, car selon Brigitte Bardot elle doit encore « faire ses preuves », mais c’est un processus largement enclenché.

Cela depuis quelques temps déjà, d’ailleurs : la revue très marquée à droite Valeurs Actuelles publiait ainsi en novembre 2017 un article intitulé « Copinages, tweets racistes : Parisot prête à tout pour mettre la main sur la Fondation Bardot ».

L’article se voulait éminemment à charge :

« L’inquiétude règne autour de la Fondation Brigitte Bardot : l’ancienne patronne du Medef et de l’Ifop Laurence Parisot lorgne sur cette structure vouée à la défense des animaux (comptant 75.000 donateurs et une centaine de salariés) créée en 1986 par l’ancienne actrice. »

Laurence Parisot ferait même partie des quelques abonnés du compte twitter du mari de Brigitte Bardot, qui publie des choses comme :

« Les noirs, une espèce qui ne sera jamais complètement humaine, même ces forces de la nature que sont les gorilles ont plus de sentiments »

Laurence Parisot et Brigitte Bardot ont demandé un droit de réponse, la première affirmant quelque chose qu’on pourra évaluer à l’avenir comme il se doit :

« Si je me réjouis de mes excellentes relations avec Brigitte BARDOT et d’avoir été désignée au conseil d’administration de sa fondation, je n’en convoite en aucun cas la présidence. »

D’autant plus que dans son propre droit de réponse, Brigitte Bardot l’annonce en quelque sorte à mots couverts :

« Laurence Parisot m’a fait l’honneur de rejoindre ma Fondation en qualité d’administrateur et je la remercie de son engagement personnel et de sa motivation à défendre la cause des animaux, n’en déplaise aux esprits chagrins.

Elle est une personne loyale et intègre qui saura mettre du cœur à l’engagement de ma vie et je lui fais entière confiance. »

Mais pourquoi Brigitte Bardot a-t-elle choisi Laurence Parisot ? C’est une question vraiment importante. Cela en dit long, en effet, sur la question de la nature du mouvement pour les animaux au sens le plus strict.

Car, on l’aura compris, Laurence Parisot est tout sauf une rebelle. Elle est un gage d’institutionnalisation maximale en tant qu’ancienne dirigeante du MEDEF. Cela permettra de pérenniser la Fondation Brigitte Bardot dans un cadre général.

Son profil mesuré correspond tout à fait à ce dont a besoin la Fondation Brigitte Bardot : elle soutient L214, elle est pour des avancées sur le plan du droit, pour qu’une réflexion s’engage, mais hors de question faire dans les principes purs et durs.

Par conséquent, et cela compte ici de manière essentielle, elle n’est pas végane. Elle se définit comme « pas totalement végane », elle le deviendrait toujours « un petit peu plus » ce qui est bien entendu un strict non sens libéral qui lui va bien.

C’est ici une sorte d’écho à un très vieux texte publié sur l’ancêtre de LTD, Vegan Revolution, en 2005 : « Véganisme utopique et véganisme scientifique » expliquait que le véganisme utopique ne servirait qu’à diffuser l’individualisme, à ajouter des « individus » à une société libérale.

C’est très précisément ce qu’affirma l’antispécisme apparut quelques années après la parution de l’article, article qui résumait alors cette lecture libérale de la manière suivante :

« Comme Bentham le dit: “Chacun compte pour un et nul ne compte pour plus d’un”. Le rêve idéalise du citoyen bourgeois rêvant à sa tranquillité. Le fantasme fasciste de “chacun son pavillon”. »

Voilà pourquoi donc pourquoi Brigitte Bardot, historiquement d’extrême-droite, a choisi Laurence Parisot. C’est la tentative de nier le véganisme au profit d’une lecture idéale, idéalisée, idéaliste de la question animale.

Dans le sens de l’émotion et du droit individuel, dans la logique du lobbying et du positionnement individuel. Sans jamais se confronter à l’exploitation animale dans les faits.

Et contre cela – également donc contre L214, 269, etc. – il faut réaffirmer que le véganisme est né comme mouvement au tout début des années 1990, que la libération animale a commencé même une décennie auparavant avec l’ALF, que la question des animaux n’est pas le fruit d’un questionnement libéral des années 2010, mais le fruit d’une vague révolutionnaire qui apportait en même temps les réponses.

En défendant le patrimoine historique de la Cause, on protège la Cause… et on prépare la prochaine vague !