Aux USA on « célèbre » les 25 ans de l’assaut contre MOVE, consistant en le bombardement à l’explosif du quartier général de cette organisation, provoquant un incendie général dans un quartier populaire de la ville de Philadelphie, le 13 mai 1985.
61 maisons ont été incendiées; 6 adultes et 5 enfants liés à MOVE ont été tués, alors que la police a tiré 10.000 balles.
MOVE était une organisation afro-américaine prônant l’autodéfense et l’écologie radicale, avec une critique de la technologie et une vision également très religieuse.
A noter que Mumia Abu-Jamal était (et reste) lié à MOVE et qu’il militait en faveur de cette organisation lorsqu’il fut lui-même arrêté, condamné (sans preuve) pour la mort d’un policier et placé depuis dans le « couloir de la mort », en attente de son exécution.
On peut voir également ici une vidéo d’une heure consistant en une conférence (en anglais) qui s’est tenue il y a dix jours au sujet de cette attaque à l’African American History Museum.
MOVE dispose d’un site internet et 9 de ses membres sont en prison depuis… 1978 pour le meurtre (non prouvé) d’un officier de police lors de l’assaut de leur quartier général (on peut voir un documentaire de 10 minutes à ce sujet en ligne ici).
Voici un article de présentation de MOVE, tiré de la brochure « Pour la libération animale. »
Le Move
« On the Move! »
L’organisation Move ne fait pas partie du mouvement proche de l’ALF ou de l’ELF, mais elle a une grande importance historique pour différentes raisons.
La première est que cette organisation afro-américaine fait partie de celles qui dans les années 1970 ont du affronter une grande répression de la part du FBI. Le programme du FBI appelé COINTELPRO consistait en un large programme clandestin d’élimination des militants, de désinformations massives, de faux communiqués, fausses lettres, sabotages, manipulations diverses, etc. Move est ainsi connu au même titre que le Black Panther Party ou encore l’American Indian Movement.
Une seconde raison est que Mumia Abu-Jamal, prisonnier politique afro-américain dans le couloir de la mort aux USA et issu des Black Panthers, dont la situation est relativement bien connue en France, était le porte-parole de Move au moment de son arrestation.
La troisième raison est que Movepossédait une orientation idéologique écologique très forte.
Cette dimension écologique est en fait très inspirée par une vision religieuse africaniste du monde, relativement proche par ailleurs de la religion rastafari. Move affirme défendre la « vie » et le terme de Move vient de l’expression « on the move » (en mouvement), qui est également la salutation des membres de la communauté. Car Move se revendique comme « communauté religieuse » et le fondateur de Move a un statut proche du gourou.
Pour Move en effet Dieu est en même temps « Mère Nature » ou « Mama » ; il existe une loi naturelle à laquelle il faut revenir, en se fondant sur la vie en communauté et l’auto-défense. Chaque personne adhérant à la communauté, quelle que soit son origine ethnique, prend comme nom de famille « Africa ».
De la même manière que les rastas ont « Babylone », pour Move le système est « une structure artificielle dont le fonctionnement repose sur un gouvernement, une armée, la grande production industrielle et son corollaire les compagnies financières internationales. »
Dans la philosophie de Move, « Les prodiges de la science et du soi-disant progrès technologique sont générés par un système cupide qui ignore les impératifs du vivant. ».
Les hommes politiques sont les alliés des industriels qui vendent du poison industriel : « Depuis plus d’un siècle, l’industrie vole à la terre d’innombrables tonnes de minéraux, des milliards de litres de pétrole et contraint des millions de gens à fabriquer des voitures, des camions, des avions et des trains qui polluent un peu plus l’atmosphère chaque jour. »
Et parce que tout ceci rapporte des milliards de dollars, le système encourage ensuite ce mode de déplacement artificiel qu’il substitue aux jambes dont mère nature nous a doté pour marcher et courir.
Ce sont ces mêmes industriels et hommes d’affaires qui favorisent la production massive et la vente forcée de cigarettes, d’alcool et de drogues, afin de tirer des profits supplémentaires de gens qu’ils ont rendu malades et dépendants. Puis des hommes politiques sont élus pour légaliser, soutenir et protéger les intérêts des grands industriels et de leurs compagnies : « c’est pourquoi nous ne croyons pas aux vertus de la politique. »
Les enfants de la communauté ne vont pas à l’école ; les accouchements se font au sein de la communauté et sans médicaments. Les membres de la communauté ne se coupent pas les cheveux, ne les coiffent pas non plus ; Move est hostile aux cosmétiques, aux détergents chimiques.
Les aliments doivent également être frais et crus, le régime alimentaire est végétarien. Move aurait pu être une simple « secte » si sa philosophie ne rentrait pas dans le cadre du grand mouvement révolutionnaire des années 1970 aux USA.
Les membres de Move étaient des naturalistes révolutionnaires considérant que le système empoisonnait les gens, et leurs activités militantes allaient de pair avec cet engagement. Les membres de Move menaient ainsi à Philadelphie des activités communautaires, balayaient les rues, enlevaient la neige, faisaient se promener les chiens, aidaient les SDF à trouver un logement et les personnes âgées pour les réparations.
Ils avaient également une station pour laver les voitures qui avait un grand succès. Ils prônaient la lutte contre les drogues, la violence et ils intervenaient même contre les guerres de gangs.
Après des interventions de plus en plus brutales de la police à leur encontre, le 20 mai 1977 les membres de Move apparurent armés dans le bâtiment de leur communauté.
Après plusieurs mois Move accepta de désarmer son bâtiment, uniquement en fait pour subir l’assaut en traître du FBI. Il n’y avait pas d’armes, et le seul policier tué le fut d’une balle dans le dos, depuis la rue, mais la police émit de fausses preuves, contre lesquelles travailla Mumia Abu-Jamal. 9 membres de Move furent condamnés à plus de 30 ans à perpétuité. Ils passèrent souvent plusieurs années en isolement en raison de leurs convictions religieuses (refus de se couper les cheveux, refus de donner du sang, etc.)
Les brutalités policières continuèrent jusqu’à un nouvel assaut militaire le 12 mai 1985, avec hélicoptères et explosifs. Au bout d’une dizaine d’heures d’un assaut sans opposition, 6 adultes et 5 enfants de Move furent tués. Move considère que 17 de ses membres (y compris 4 fausses couches) furent assassinés par la police. Depuis, Move existe encore et défend ses opinions, mais a été totalement marginalisé après la répression du FBI et sans nul doute aussi son incapacité à dépasser sa propre interprétation religieuse du monde.